Touche pas à mon ADN
En instaurant des tests ADN pour prouver une filiation dans le
cadre d'un regroupement familial, l'amendement Mariani, adopté par
l'Assemblée Nationale, fait entrer la génétique dans l'ère d'une
utilisation non plus simplement médicale et judiciaire mais dorénavant
dévolue au contrôle étatique.
Cette nouvelle donne pose trois séries de problèmes fondamentaux.
Tout d'abord, des problèmes d'ordre éthique. En effet, l'utilisation de
tests ADN pour savoir si un enfant peut venir ou non rejoindre un
parent en France pose d'emblée cette question : depuis quand la
génétique va t'elle décider de qui a le droit ou non de s'établir sur
un territoire ? Au-delà, depuis quand une famille devrait-elle se
définir en termes génétiques ? Sont pères ou mères les personnes qui
apportent amour, soin et éducation à ceux et celles qu'ils
reconnaissent comme étant leurs enfants.
Ensuite, cet amendement fait voler en éclats le consensus précieux de
la loi bioéthique qui éloignait les utilisations de la génétique
contraires à notre idée de la civilisation et de la liberté.
Enfin, cet amendement s'inscrit dans un contexte de suspicion
généralisée et récurrente envers les étrangers qui en vient désormais à
menacer le vivre ensemble. Car tout le monde s'accorde à dire que la
fraude au regroupement familial ne peut être que marginale au regard
des chiffres d'enfants annuellement concernés et au regard de l'absence
de raison substantielle qu'il y aurait à frauder dans ce domaine. En
effet, quelle étrange raison pousserait les immigrés à faire venir
massivement dans notre pays des enfants qu'ils sauraient ne pas être
les leurs ? Autrement dit, l'amendement instaurant les tests ADN n'a
pas pour fonction de lutter contre une fraude hypothétique mais bien de
participer à cette vision des immigrés que nous récusons avec force.
Nous sommes donc face à un amendement qui, sur les plans éthique,
scientifique et du vivre ensemble introduit des changements
profondément négatifs. C'est pourquoi, nous, signataires de cette
pétition, appelons le Président de la République et le Gouvernement à
retirer cette disposition, sous peine de contribuer, en introduisant
l'idée que l'on pourrait apporter une réponse biologique à une question
politique, à briser durablement les conditions d'un débat démocratique,
serein et constructif sur les questions liées à l'immigration.